un projet éducatif de la Cité de la musique


Projet pédagogique

Stravinski en mode Hip-Hop

Vive, pulsée, tranchée, virtuose, énergique, symbolique, flamboyante, renversante : voilà comment pourrait se caractériser la musique dansée d'Igor Stravinski,depuis ses essais post-romantiques (Scherzo fantastique, 1908) et populaires (Petrouchka, 1911), jusqu'au célébrissime Sacre du printemps (1913), connu depuis sa création pour avoir révolutionné les conventions du ballet. C'est cette énergie, correspondant idéalement à son orchestre Les Siècles, que François Xavier Roth fait revivre depuis plusieurs années, au fil de concerts faisant revivre le répertoire original des fameux Ballets russes.

C’est une expérience tout à fait originale qui se concrétisera à la Grande Halle de la Villette en avril prochain dans le cadre du cycle « Schönberg / Stravinski ». Soixante-quinze adolescents, âgés de 10 à 18 ans et issus de communes et de quartiers proches de La Villette, viendront présenter un spectacle de danse hip-hop plutôt insolite, une adaptation du Sacre du printemps d’Igor Stravinski.

Un projet stimulant et participatif, dont l’écriture est actuellement menée conjointement avec les jeunes danseurs – néophytes pour la plupart – dans le cadre d’ateliers visant à l’appropriation de l’oeuvre par la pratique. À l’initiative du projet, le chorégraphe Farid Berki a soutenu le choix de la pièce phare de Stravinski, une oeuvre ayant fait scandale lors de sa création en 1913 par son approche radicale du rythme et – déjà – par sa vision chorégraphique nouvelle signée Nijinski. « Pour moi, l’idée de replacer cette oeuvre dans un contexte hip-hop me paraît évidente car elle constitue un rituel de passage de l’adolescence à l’âge adulte », précise celui qui est considéré comme l’un des pionniers de la danse hip-hop en France. « C’est un hymne à la jeunesse qui se révèle, se cherche et s’émancipe. » Après Petrouchka et le Scherzo fantastique, sur lequel il travaille conjointement avec sa compagnie Melting Spot, Farid Berki revendique un attachement particulier aux ballets du grand compositeur russe. « Chez Stravinski, la danse n’est pas piégée par la musique, poursuit-il. Elle est au contraire libre de naviguer entre les lignes mélodiques, le rythme et les structures complexes. »

  • Igor Stravinski, Petrouchka

    Budapest Festival Orchestra ; Ivan Fischer, direction, Pleyel 09 janvier 2010

  • Igor Stravinski, Scherzo fantastique

    BBC Symphony Orchestra, New York Philharmonic, Pierre Boulez, direction.

Au-delà de l’approche artistique, le projet mené a une forte vocation pédagogique. « C’est une chance pour ces jeunes de partager des instants uniques et exceptionnels, reconnaît-il. Il est pour moi important de créer des passerelles entre les artistes dits “professionnels” et les publics dits “empêchés”. La dimension citoyenne du projet est essentielle. J’aime ce genre d’aventure improbable car elle m’oblige à réinterroger ma place d’artiste dans la cité. » Également impliqués, le chef François-Xavier Roth et son orchestre Les Siècles accompagnent eux aussi les jeunes en ateliers et seront présents sur scène. « Nous envisageons une participation active de l’orchestre au spectacle dans son aspect visuel et scénique, souligne François-Xavier Roth. Avec l’équipe technique de la Grande Halle, nous sommes en train de bâtir une scénographie qui prévoit de placer l’orchestre au centre de la danse, et qui autoriserait les danseurs à évoluer au plus près des musiciens. Pour le résultat fi nal, je n’ai aucune inquiétude ! ».

Laurent Catala

Affiche : Photo © George Grantham Bain Collection - Conception graphique www.destyle.fr