Dans ce Domaine privé, on entendra vos œuvres mais également celles d’autres compositeurs finlandais, notamment Sibelius. Y a-t-il une vie après Sibelius en Finlande ?
Je n’ai jamais été gênée par Sibelius. Mais la génération qui lui a immédiatement succédé a certainement dû vivre dans son ombre. La Finlande est un petit pays, sa musique est partout ; cette situation a certainement été dure à vivre pour certains musiciens.
Existe-t-il un lien entre le quatuor Voces intimae de Sibelius et votre Terra memoria ?
Ce sont deux mondes différents. Le langage de
Sibelius n’a rien à voir avec le mien, mais en même temps, sa pièce s’appelle « les voix in-times » et la mienne est également une pièce très intime. Elle n’a pas été inspirée par l’œuvre de Sibelius mais peut-être que, jouée lors d’un même concert, elle révélera des points communs auxquels je n’avais pas pensé.
Doit-on voir dans l’œuvre de Sibelius une dimension cosmique ?
Il était très proche de la nature. Comme chaque personne habitant en Finlande, il a vécu au milieu d’elle car elle est très présente. C’est donc un thème important au sein de son œuvre. De mon côté, j’écoute les pièces de Sibelius comme j’écoute la musique d’un autre compositeur, de manière plus analytique.
Quelle est la signification du terme « Maa » qui donne son nom à la première œuvre que nous entendrons ?
En finnois, cela veut dire « la terre » ou « le pays ». Ce nom est à l’origine du projet de ballet créé avec Carolyn Carlson au début des années 1990. Il se déroule en sept mouvements et chacun de ces mouvements correspond à un voyage métaphorique différent. Nous assisterons ici à une chorégraphie de Luca Veggetti créée à New-York avec l’ensemble ICE. Ce Domaine privé évoque également la dimension lyrique, opératique de votre œuvre, notamment à travers
Adriana Mater et
Émilie.
Pouvez-vous évoquer votre collaboration avec Amin Maalouf et Peter Sellars ?
J'ai créé trois opéras ; les deux premiers ont fait l'objet de collaborations avec Amin Maalouf et Peter Sellars. Peter a aussi travaillé avec nous sur La Passion de Simon qui est un oratorio. Avec Amin, nous avons poursuivi notre collaboration pour le troisième opéra, Émilie. Lors de sa création à Lyon, François Girard a assuré la mise en scène. Dans ce Domaine privé, on entendra Émilie Suite, créée à partir de l'opéra.
Enfin, lors du dernier concert, nous entendrons des œuvres de Paavo Heininen et Lotta Wennäkoski. À quelle génération appartiennent-ils ?
Pour ce dernier concert, j’ai choisi des œuvres de deux autres compositeurs fi nlandais. Paavo Heininen était mon professeur, c’est un personnage très important dans mon parcours personnel, mais aussi dans la vie musicale finlandaise ; et Lotta Wennäkoski est une femme qui a été mon élève. Je me suis dit que ce serait très intéressant d’avoir trois générations de professeurs et d’élèves en regard dans un même concert.
Propos recueillis par Pascal Huynh
Photo : Kaija Saariaho © Juha Törmälä
Avec le soutien de l'Institut finlandais de Paris et l'Ambassade de Finlande en France, de la Fondation LUSES, Foundation for the Promotion of Finnish Music et du programme FACE, fonds franco-américain pour la musique contemporaine